Cancer Mickey versus Cancer Dark Vador

ça fait lontemps que je veux faire ce billet. A l'origine, j'étais agacée de voir circuler sur les forums et les groupes cancer, des personnes disant : "Il n'y a pas de petit cancer, il n'y a que le cancer". Oui, oui ok il y a le cancer en terme de pelle dans la tronche, de tsunami émotionnel, de difficile gestion de la nouvelle et du reste, des traitements très lourds à supporter, d'opérations traumatisantes, de coup de hâche dans la féminité. Oui, le Cancer est une épreuve terrible. Oui, il n'y a pas de hiérarchie dans la souffrance. Oui mais non il y a bien des ..... petits cancers, pardon de "faire ma Flo" comme diraient mes proches. Ce que j'appelle des cancers "light", comme mon étoile dans le sein "un cancer Mickey". 
C'est quoi un Cancer Mickey ? Et un Cancer Dark Vador ? 
Alors, ce que j'appelle un cancer "Mickey" c'est quoi petit Padawan ? (Hello  mes collègues chous qui vont se rappeler quand je dis au taff : "bon va arrêter les petits mickeys là hein les loulous " quand un truc me déplait et que je trouve que c'est du pas "sérieux" :) ça vous manque ,je le sais , vous me manquez aussi !!!!)
Ben un cancer Mickey c'est ce que j'ai eu la chance d'avoir : une simple tumorectomie, une lésion ridicule de 4 mm,  un ki67 de 3% (et de 1% post op), un H2R négatif, pas génétique,  bref un cancer d'excellent pronostic. Tellement petit,  que j'ai pas eu chimio. Tellement petit qu'aux résulats Anapth, Super Z m'a dit : "Aujourd'hui vous n'avez pas plus de risque de refaire un cancer du sein que la population générale". Tellement petit que nous ne sommes même pas encore certains que l'hormono je la prenne. Tellement petit que j'ai même pas peur de récidiver. Tu vois ou je veux en venir petit Padawan ? 
Un cancer Dark Vador, il est pas petit justement. C'est ce que certaines de mes copines ont : c'est un salopard, un vilain, un méchant, aux mauvaises statistiques (ne nous voilons pas la face tout le monde va chercher ça !) et au pronostic moins bon, pour ne pas dire dans certains cas, franchement dégueulasse. Ce sont des gros grades, des gros stades, ce sont les triplettes qui partent avec une feuille de route plus lourde et moins favorable, ou les métatasées qui, elles, savent qu'elles ne guériront pas : t' imagines toi si t'as un cancer incurable et que tu lis sans arrêt : "y a pas de petit cancer".  Alors je ne sais pas quel débile a dit : "Comparaison n'est pas raison" parce que si comparaison est raison justement, pour ne pas dire lucidité ! Ce sont toutes les oubliées d'Octobre Rose dont j'ai déjà parlé. C'était pour elles ce billet à l'origine, et elles me disaient : "Quand est ce que que tu le fais ? ça va nous nous tellement de bien que tu remettes l'église au milieu du village". "
Mais pour une fois je ne vais pas parler d'elles, ni des autres femmes en général. Je ne vais pas porter pour une fois la parole des autres mais la mienne parce que pour une fois dans ma vie, j'ai besoin de porter la mienne. Parce que le Dark Vador c'est sur moi qu'il vient de tomber là. 
Porter la parole des autres, ou la mienne ? 
J'ai toujours porté la parole des autres. Je le faisais déjà enfant en prenant la défense de mes camarades à lécole. Je ne vais pas tout raconter ici, ce n'est ni le but , ni l'espace. Je veux juste dire pourquoi je vais arrêter ce blog mais pas seulement. Va jusqu'au bout petit Padawan, (qu'on se connaisse ou pas, je ne connais pas mes lecteurs et lectrices or les statitisques sont vertigineuses 8000 vues depuis 3 mois....) et  même si c'est un peu long, c'est important tu verras. Le rôle de locomotive et d'accompagnatrice, je l'ai toujours eu dans ma vie. Je l'ai embrassé avec passion, volonté, plaisir, audace, courage et il m'a beaucoup apporté. J'en ai payé le prix aussi. J'ai eu peur aussi. J'ai été en colère aussi (beaucoup). 
J'ai été notamment coach pour Sciences-Po Paris et la Sorbonne pendant deux ans dans le cadre d'une expérimentation sociale lancée par Martin Hirsch sur les freins chez les étudiants boursiers et leur entrée sur le marché du travail. J'ai pu le faire parce qu'en plus de mon ancier métier de journaliste , j'ai fait partie de la première promo à la fac il y a une quinzaine d'années sur un diplome de coaching. J'étais déterminée à être la meilleure, et je l'ai été avec une"Mention très bien félicitations du jury" (alors même que mon sujet de mémoire n'avait pas été validé par l'équipe enseignante mais je suis têtue et qu'à ma soutenance je pensais avoir été nulle.....). Les portes se sont ouvertes pour moi en grand. Avec un peu de vertige je l'avoue : serais-je à la hauteur ? , Légitime?  alors que j'étais face à des DRH bien plus expérimentés que moi sur le sujet ? Et le coaching de riche aussi :) J'étais payée 150 euros de l'heure, j'avais limite honte :). Dèjà je réalise là que je ne m'aimais pas suffisamment. Mais ça je ne le savais pas encore. J'étais dans le complexe d'imposture. Je me souviens d'un des membres du jury qui m'a posé une question simple à laquelle j'ai été incapable de répondre à ma soutenance publique de mémoire : "^{En fait savez vous vraiment ce que vous avez brillament réussi à démontrer dans votre travail" ?} Je n'ai pas su répondre, j'avais travaillé sur l'authenticité comme outil de coaching, sujet refusé, ça se bousculait dans ma tête, je vais avoir une note minable etc...". Et de me dire : "Vous avez travaillé sur l'amour".  Je n'avais toujours pas compris à l'époque. 
Bref, J'ai accompagné des dizaines d'étudiants pendant deux ans dans le cadre d'entretiens individuels et collectifs pour essayer de leur donner confiance en eux et les aider du mieux que je pouvais à décoller, décrocher des postes, des masters, bref à tracer leur route. Une expérience sublime, valorisante pour moi comme pour eux. Accompagner des jeunes et les aider à s'incarner dans la vie avec confiance, que souhaiter de plus ? Partager avec eux les résultats de ces échanges et leur succès aussi. J'en garde un souvenir formidable. 
Mais j'ai accompagné aussi des salariés, des collaborateurs dans le cadre de mon expérience professionnelle. Je portais leur voix. ça m'a valu deux licenciements. Je vais parler du second, dans la presse, pour illustrer tout ca.  J'ai été licenciée de ma rédaction parce que j'ai pris la défense des journalistes qui étaient en souffrance au travail. J'ai été porter leur voix auprès de la DRH. Qui m'a bien sur félicitée de mon audace, de mon courage et du fait de les alerter sur le fait que deux trous du cul traumatisaient toute une équipe (allez "un peu de biblio", petit Padawan, comme dit ma Cristina chérie, lire à ce sujet, l'excellent "Objectif zero-sale-con, petit guide de survie face aux connards, despotes, enflures, harceleurs, trous du cul et autres personnes nuisibles qui sévisssent au travail" de Robert Sutton, professeur de management à l'université Stanford).     Deux jours après,  On m'a virée pour ....."fautes de grammaire" ! Je n'avais qu'à me taire en somme et surtout ne pas entraîner les autres. ça a marché sur léquipe, évidemment. La peur, ça marche toujours. C'est le ressort de toutes les tyrannies humaines, de tous les sytèmes humains. La peur et la force du groupe.  Mon avocat, quand je pleurais  en lisant la lettre de licenciement se frottait les mains en me disant : "Madame B ne pleurez pas nous allons gagner". Ben tiens avec un tel motif grotesque de licenciement, le procès  était dejà plié ....Mais je ne pleurais pas, en fait, je te le dis, petit Padawan, sur le fait d'avoir peur de perdre mon procès d'autant que j'avais en plus 20 témoignages de patrons sur mon professionnalisme mais bien sur le fait que mes collègues journalistes, les mêmes qui m'avaient poussée à aller les defendre et à porter leur voix, (les rédactions en presse écrite sont un systéme d'une violence inouie)  n'ont même pas levé les yeux  vers moi quand j'ai fait mon carton en dix minutes en larmes après 7 ans de bons et loyaux services. Ce n'est pas tant l'injustice de la situation qui m'a révoltée mais cette manière de se comporter en groupe. La force d'un groupe est terrible, la tyrannie d'un groupe et de la majorité, c'est horrible.  Et pour se dresser individuellement, il faut du carractére et de la persévérance (et sans doute aussi une forme d'inconscience :). Mais je ne regrette rien, j'ai fait ce que j'avais à faire. Et la vie me l'a rendue mille fois en cadeau à la suite, j'ai trouvé un super taff dérrière avec un patron qui aime mes coups de sang et qui m'a embauchée au delà de mes compétences pour ce que je suis.... moi. 
J'ai porté la voix des copropriétaires dans mon ancienne résidence, j'ai commencé seule avant d'être rejointe par 80 personnes (et le syndic mafieux a été ejecté après un long combat) , J'ai porté la voix des enfants en faisant du bénévolat à l'Enfant Bleu et à l'hôpital. J'ai porté la voix des femmes violentées par leurs mecs (je me tenais physiquement fière devant la porte quand le mec arrivait), j'ai porté la voix d'Elie ma voisine du dessous battue par ses frères , j'allais sonner à la porte quand je l'entendais hurler, j'ai porté la voix de tellement de personnes dans ma vie en fait. Et j'ai porté la voix des femmes dans ce blog. Il y a tellement d'exemples, ce n'est pas le but, je veux juste dire aujourd'hui ou j'en suis en fait. 
Je suis capable, c'est mon ADN, de me dresser droite dans mes bottes et d'affronter une armée entière devant moi. Je n'exagère pas, mes proches le savent et d'ailleurs flippent parfois par rapport à ca. C'est ma personnalité, c'est comme ca et c'est mon choix aussi. Et je peux aller très loin en la matière. Je ne regrette rien. Tout ça ne fait pas de moi quelqu'un de meilleur, ce n'est pas ce que je veux dire, tout ça fait que je me suis ....oubliée. Je me suis oubliée depuis tant d'années. Et le courage pour moi aujourd'hui, c'est bien de m'arrêter en fait. 
Donc avec Dark Vador je me suis dit : quand est ce que je vais porter ma propre voix en fait ? Quand est ce que je vais enfin m'écouter moi ? Prendre le temps pour moi. 
Le cancer du poumon, l'annonce, ma jumelle, et petite histoire du ....souffle !
Cette manière de porter les voix des autres en général, la parole libre qui m'a tant comblée est en train de m'embraser là. On ne chope pas 2 cancers en même temps, le sein d'abord, puis le poumon 3 mois après, sans nécéssairement s'arrêter pour....  entendre. Le corps est naturellement foutu pour aller bien et être son propre médecin. C'est ce que je crois profondément. Sinon comment expliquer que certains chopent les virus et pas d'autres ? Pourquoi Adèle mon arrière grand-mère qui clopait deux paquets de gitanes maïs par jour n'a pas eu de cancer et est morte à plus de 90 ans tranquilou. Pourquoi deux de mes amoureux qui avaient une vie plus que saine sont morts de cette saloperie ; Raphaël, cancer du pancréas , parti en 8 mois à 42 ans : il mangeait bio, ne fumait pas, ne buvait pas, faisait 10 heures de sport par semaine. Henri, bien sûr,  d'une leucémie en 5 ans qui se lève un matin avec du sang sur l'oreiller et qui n'avait aucun des facteurs de risques. Oui oui je sais petit Padawan, deux amoureux qui meurrent d'un cancer, ça fait beaucoup aussi.... Je sais pas, je dois être abonnée à choisir des amoureux destinés à mourrir avant moi, va savoir.....
Ce sont nos propres défenses immunitaires qui tiennent la barre. Moi les miennes là ne sont plus au point mais alors plus du tout. Comme pour eux. Et il y a un truc a entendre. Je vais être suivie, accompagnée, opérée bien sûr mais c'est moi mon propre médecin. Personne d'autre. Il y a le corps et il y a l'esprit et aussi il y a surtout ....l'âme. C'est la dernière alerte, je le sais, il n'y en aura pas d'autre. Or je veux  guérir et je vais guérir et pour faire les bons choix, il me faut désormais penser vraiment à moi. 
Je n'ai plus de souffle. ça fait des années que je ne respire pas. Je suis en apnée permanente. Ce que mon poumon est venu me dire, c'est ça ! La fracture du poignet (la souplesse) en avril n'a pas suffit. Le sein en juillet, non plus. ça fait des années que je ne m'aime pas en fait mais que je crois m'aimer. Il est temps là. 
Quand le pneumologue m'a confirmé que c'était bien un cancer du poumon, je suis passée dans une dimension stratosphérique.... L'annonce pour le sein avait été un cauchemar. Mais là, là ça faisait trop, beaucoup trop.... 2 cancers dans la tronche en 4 mois, mais serieusement .... Ma jumelle était avec moi et a pu entendre pour moi ce qu'il essayait de me dire sur le protocole a venir. Heureusement qu'elle etait là ma Juju, elle et moi avons vécu tellement de choses déjà douloureuses, elle sait ce que tout ça fait, elle le sait, profondément. Moi le poumon, elle le coeur.... Je t'aime ma Lénou. 
Je n'ai plus le temps là donc  de porter donc la parole des autres mais de porter la mienne. 
Je n'ai pas toutes les réponses là, mais elles vont venir, je le sais,  mais comme m'écrivait une personne que j'apprécie beaucoup  , dont la rencontre n'est pas un hasard dans ma vie, je le sais, et elle se reconnaitra mais c'est entre cette personne là et moi , "après l'étoile dans le sein et la nébuleuse dans le poumon, il faut s'arreter là". Nebuleuse dans le poumon, très belle image.... Oui il faut s'arrêter là. 
Je vous en prie, pour certains et certaines, ne m'écrivez plus donc : "Ben tu vas arrêter la cigarette ?!" . Oui j'ai fumé, oui j'ai pris des risques  mais ce n'est vraiment pas la question là aujourd'hui. Des risques j'en ai pris toute ma vie et je n'en regrette aucun.  Aucun. Dans ces propos moi j'entends : "Tu le mérites ce cancer" ! _{Je ne le mérite pas plus que tous ceux qui ont eu un cancer du poumon sans même être fumeurs ! On est bien d'accord avec ça ?} Evidemment qu'avec un tiers du poumon en moins, je vais définitivement arrêter, je ne suis pas débile non plus. Donc stop la dessus. 
Merci à Martine et Laeti d'être venues me rassurer sur des cas concrets de lobetctomie ou depuis la vie est toujours là. Merci les filles. 
Merci à ma fille, qui lira ce blog plus tard. 
Merci à tous ceux et toutes celles qui me donnent aussi beaucoup d'amour. Merci ma Cristina, ma jumelle, Isa,  Fred, Lu, Alex, Coco, Claire, Marie, Sev, mes supers collègues, France, Valérie, Laura, Renaud, Nicky, Sab, Joyce, Virginie, Super Z,  ....  je ne peux pas citer tout le monde mais merci vraiment. 
Je pars pour le Tep Scan et comme je disais ce matin à Coco :" Si on m'annonce des métas, je vais direct me jeter dans la seine là :) ". Et elle a eu ces mots formidables : " Il fait trop froid, si tu te loupes, tu serais encore capable de te choper une pneumonie :)" . 
Je finis sur ces mots de Clement Rousset, philopsophe trop peu reconnu et que je kiffe : 
" Je sais maintenant, j 'ai enfin compris que la joie est plus profonde que la tristesse. C'est ma devise, Si je devais avoir un crédo philosophique, ce serait celui là". 
Je garde donc ma joie entière et profonde . 
Et comme disait Clément, il faut accepter le réel !